LeMonde.fr - 03/10/10 - Inscris-toi gratuitement et surfe sans pub !
The Good Wife - Les épouses ne sont plus épargnées
C‘était une des bonnes surprises de la saison passée. Cela devrait être une des bonnes confirmations de cette saison. L’idée de départ de Robert et Michelle King s’inspirait de faits réels qui ont touché plusieurs hommes publics américains dont Eliot Spitzer, ancien procureur général de l’Etat de New York contraint de démissionner en 2008 en raison de son implication dans une affaire de prostitution.
The Good Wife prend son origine dans ces images qui ont souvent fait la une des journaux télévisés américains: une femme trompée soumise aux regards du public qui se tient aux côtés de son mari niant les faits qui lui sont reprochés et s’accrochant à sa présomption d’innocence. De ce point de vue, la saison opère une boucle, Alicia Florrick (Julianna Margulies) se retrouve aux côtés de son mari Peter (Chris Noth), ancien State’s Attorney du comté de Cook, après que ce dernier a réhabilité son nom.
Si Peter était tenté de reprendre là où les choses en étaient restées avant qu’il aille passer quelques temps en prison, l’actualité est là pour lui rappeler que cela n’est pas une bonne idée. La saison 2 s’ouvre sur un autre scandale, exactement de même nature que celui qui l’a touché. Et il n’a pas besoin de beaucoup d’imagination pour se revoir à la place d’un représentant du Colorado qui emploie exactement la même rhétorique pour clamer sa bonne foi.
Robert et Michelle King ne lâchent donc pas leur sujet qui est de montrer la complexité de la situation de ces femmes bafouées et humiliées en public et de la manière dont elles doivent réorganiser leur existence. Dans le cas d’Alicia, c’est reprendre une activité d’avocate au bas de l’échelle, comme junior associate, dans un cabinet dirigé par un ancien camarade de fac, Will Gardner (Josh Charles). La série repose également sur une forme de solidarité féminine qui se noue, d’une part avec Kalinda, enquêtrice bisexuelle aussi efficace que mystérieuse, qui travaille pour le cabinet d’avocats. D’autre part, avec Diane Lockhart (Christine Baranski), autre associée, qui va se montrer compréhensive à l’égard d’Alicia.
Les faire s’affronter aurait certes créé une histoire secondaire, mais celle-ci aurait été trop prévisible et n’aurait pas permis d’explorer la vie à l’intérieur de cette entreprise. The Good Wife éclaire avec une vraie subtilité l’ambiguité des rapports qui existent à la fois à l’intérieur d’une firme juridique, mais également des relations constantes avec le ministère public. Beaucoup a à voir avec les compromis, les incertitudes, les tractations et les méandres des enquêtes. La défense de la veuve et de l’orphelin et la protection du citoyen menacé d’être broyé par l’aveugle machine judiciaire ont été en partie laissées de côté, cette fois-ci.
La réussite de cette série repose sur sa complexité qui s’est encore accrue avec ce début de saison 2. Il y a l’histoire de Peter et Alicia et en regard celle d’Alicia et de Will. Mais, il y a désormais la campagne électorale que Peter doit mener pour retrouver son ancien poste. Et dans ce domaine, tous les coups risquent d’être permis. Il y a aussi le personnage d’Eli Gold, émise grise comme il en existe dans l’ombre de beaucoup d’hommes publics et dont le rôle est de faire triompher leur champion, quel que soit le prix.
Cette campagne, qui devrait rythme l’année (comme la déchéance de Peter Florrick a servi de colonne vertébrale à la saison 1), repose sur la rivalité avec Glenn Childs (Titus Welliver), le nouveau state’s attorney. Cette rivalité va se doubler de celle née entre Alicia et Cary Agos, jeune loup aux dents très longues, qui a rejoint les services du procureur après avoir été écarté au profit de la jeune femme au sein du cabinet d’avocats.
Enfin, vient s’ajouter une fusion indispensable pour sauver le cabinet et l’instauration d’un système de tutorat pour les avocats juniors qui vont être autant de moyens d’explorer un peu plus les relations de travail et d’ajouter aux incertitudes d’Alicia. Le caractère dominant de la jeune femme est la confusion. Depuis la trahison de son mari, elle a perdu de nombreux repères et elle donne l’impression de simplement tenter de conserver la tête hors de lui. L’une de ses craintes est également de devoir faire des choses que sa conscience pourrait réprouver. Comme si la faute de son mari rejaillissait sur elle en lui disant de ne pas se comporter comme lui, de conserver une dignitié qu’il a perdue.
Cet état d’esprit contraste avec celui de Kalinda, dont la première préoccupation est l’efficacité et qui ne souhaite pas s’embarrasser de cas de conscience. La fin justifie bien des moyens et ce sont ces moyens qu’Alicia ne veut pas connaître, appréciant que quelqu’un les emploie pour elle. Il y a une ambivalence chez Alicia Florrick, elle est tentée par l’idée que tout rentre dans l’ordre et en même temps, elle est prête à faire le grand saut vers une autre vie. Elle n’a simplement pas trouvé le détonateur qui l’arrachera à son passé. Mais cela ne devrait être qu’une question de temps. Car comme le dit Eli Gold: “It’s modern politics. Wives are no longer off limits“.
Le Monde des Séries